L’exercice du droit de grève : voici l’essentiel à savoir pour les salariés du privé.

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1°) En tant que salarié du privé, suis-je en droit de faire grève ?

Plusieurs confédérations appellent tous les travailleurs, du public et du privé, le 5 décembre à une journée de grève nationale et interprofessionnelle contre la réforme à venir des retraites. Répondre favorablement à un tel appel, déclenché hors de l’entreprise, est ce que l’on appelle une “grève de solidarité externe”.
Classiquement, les juges considèrent que participer à une grève générale, apparaissant comme une manifestation nationale de solidarité professionnelle pour la défense de l’emploi, du budget des salariés et du droit syndical, est une grève licite dès lors qu’elle tend à la satisfaction de certaines revendications d’ordre social et professionnel. Même si ces revendications sont générales et communes à un très grand nombre de travailleurs, elles n’en demeurent pas moins de nature à intéresser chaque salarié en entreprise (lire l’arrêt du 12 janvier 1971). Tel est le cas de la journée de mobilisations à venir ce jeudi.

2°) Puis-je être le seul de mon entreprise à faire grève ?

La grève est par nature un mouvement collectif. Elle ne peut donc pas être le fait d’un salarié agissant seul (sauf s’il est l’unique salarié de l’entreprise). Mais dans le cadre d’une grève nationale interprofessionnelle, le caractère collectif est porté par l’étendue du mouvement. Il est alors possible d’être le seul salarié de son entreprise à faire grève.

3°) Dois-je prévenir à l’avance de mon absence ?

Ce n’est pas une obligation. Dans le secteur privé, il n’y a pas de préavis à respecter avant d’user de son droit de grève. En outre, il a été jugé qu’une convention collective ne peut pas avoir pour effet de limiter ou de réglementer pour les salariés l’exercice du droit de grève .

Attention : dans les entreprises privées chargées de la gestion d’un service public, la grève doit être précédée d’un préavis mentionnant le début et la durée de la grève envisagée (articles L. 2512-1 et L. 2512-2 du code du travail).

4°) Si le mouvement se poursuit au-delà et que je décide de prolonger mon absence pour grève, la direction peut-elle me sanctionner ?

Le code du travail est clair : “Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de l’exercice normal du droit de grève” (article L. 1132-2 du code du travail). Toute disposition ou tout acte contraire à l’égard d’un salarié est nul de plein droit.

Seule la faute lourde peut justifier le licenciement d’un salarié gréviste (en pratique, l’essentiel de ces sanctions disciplinaires résultent de conflits sociaux internes à l’entreprise).

5°) Pendant la durée de la grève, l’employeur peut-il me remplacer ?

Dans le cadre d’un appel national à la grève, l’employeur est extérieur au conflit collectif. L’idée de remplacer ses salariés grévistes dans l’espoir de “casser” la grève n’a pas vraiment de sens. Mais le principe juridique édicté par l’article L. 1242-6 du code du travail n’en reste pas moins applicable : il est interdit de conclure un CDD ou un contrat d’intérim pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d’un conflit collectif de travail.

6°) Dois-je me justifier de mon activité pendant la grève ?

Non. Le salarié qui se déclare en grève est libre de participer à un rassemblement local, de rejoindre un cortège et défiler, de monter un piquet de grève devant l’entreprise, de tracter, voire même de rester chez lui.

Pendant la grève, le contrat de travail est suspendu. Mais le salarié reste tenu à son obligation de loyauté. Il est donc interdit de travailler pour un autre employeur.

7°) Est-il possible de limiter l’exercice de son droit de grève à une demi-journée pour aller manifester ?

Bien sûr. Si l’appel national à la grève vaut pour toute la journée de jeudi, rien n’oblige à exercer son droit de grève toute la journée. La cessation d’activité peut-être d’une demi-journée, voire moins.

8°) Serai-je rémunéré pour le(s) jour(s) de grève ?

Sans surprise, la grève n’ouvre pas droit à rémunération. La suspension du contrat de travail pour faits de grève emporte celle de l’obligation pour l’employeur de payer les salaires. Mais tout travail accompli normalement avant ou après la grève doit être rémunéré. La retenue à opérer sur la rémunération du salarié gréviste doit être proportionnelle à la durée de l’arrêt de travail.

9°) Et si je suis au forfait annuel en jours ?

A défaut d’accord collectif ayant fixé d’autres modalités, la retenue sur salaire en cas de grève d’un salarié en forfait jours se calcule en fonction d’un salaire horaire “fictif” lorsque la grève est d’une durée inférieure à la journée complète ou à la demi-journée (lire l’arrêt du 13 novembre 2008).en attaché

10°) Ma participation à la grève va-t-elle apparaître sur mon bulletin de paie ?

Non. À l’identique des activités de représentation du personnel, l’exercice du droit de grève ne doit pas faire l’objet d’une mention sur le bulletin de paie, dispose l’article R. 3243-4 du code du travail.

Cour_de_cassation_civile_Chambre_sociale_13_novembre_2008_06-44.608_Publié_au_bulletin

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